12/05/03: Japon 1945-1975, hôtel de Sully, Paris.
13/05/03: Le mois, du japon, Avignon.
14/05/03: Mariko Mori, "the beginning of the end"


Histoire de l'art au Japon.


Mariko Mori
Takashi Murakami


Le mois du Japon
L'art japonais en France
Tokyo, précursseur de l'art contemporain

 

   
     
 


L'enseignement du nihon-ga - la deux dimension japonaise

Takashi Murakami rève d'abord de devenir réalisateur de dessins animés. Mais c'est finalement à un cours de peinture traditionnelle - nihon-ga - qu'il s'inscrit en 1986. Inventée en 1890 pendant l'ère Meiji, la peinture nihon-ga visait à créer un style national, situé à la croisée entre la tradition picturale japonaise de l'époque Edo (1615-1868) et les références occidentales. Murakami soutient que la création d'un espace autonome, sans la structure de la représentation réaliste, est la racine de l'esthétique en deux dimensions des japonais, ou de ce qu'il a appelé Super Flat. Le concept de superflat visait à caractériser l'art japonais par une absence de profondeur. Celle-ci définit, en effet, la perception et la représentation de l'espace dans la peinture orientale, qui ignore le système perspectif et ramène toute la composition à la surface plane de la feuille.

Le retour aux arts décoratifs

Murakami explique que " l'art japonais n'a jamais fait clairement la distinction entre la peinture et l'artisanat ". Néanmoins, la relation intime entre peinture et artisanat a été réprimée dans l'histoire de l'art après que l'idée occidentale des "beaux-arts" ait été importée par la Restauration Meiji. " J'espère sincèrement que les arts décoratifs vont se libérer de cette infériorité vis-à-vis des beaux-arts et réaffirmer leur place dans le monde des créations artistiques ".
L'artiste rejoint ainsi un aspect essentiel de l'art japonais traditionnel : le goût du décoratif qui répond à une célébration de la vie et à la prise de conscience de la fugacité des choses. Souvent développées en polyptiques, les toiles de Murakami évoquent formellement les peintures anciennes de paravents. C'est en écho à cette perspective que s'inscrivent ses peintures de fleurs : guirlandes de marguerites au graphisme enfantin et au sourire moqueur, comme dans l'oeuvre intitulée "Cosmos". Très éloignées d'une représentation réaliste, ces fleurs sont nées d'un désir de créer un "motif de peinture japonaise". Alors qu'il étudiait la peinture traditionnelle, Murakami est fasciné par les sujets classiques "neige, lune, fleur" ou encore "fleur, oiseau, vent, lune". Les fleurs lui sont apparues comme la façon de comprendre les canons de la peinture japonaise et d'en proposer une interprétation personnelle et contemporaine.

Aux motifs de fleurs, l'artiste associe souvent les personnages Kaikai et Kiki, deux petits monstres, plus sympathiques qu'effrayants, nés d'un jeu de mots : Kaikai Kiki ("élégant") ou Kiki Kaikai ("surnaturel et bizarre").

Ses références à Andy Warhol - Modernisation des processus de création, de production

Enfant du pop art, Murakami se réfère souvent à Warhol, jusqu'à baptiser en 1995, ses ateliers de production de Tokyo et Brooklyn, la Hiropon Factory en écho à la Factory warholienne. Murakami ne travaille pas de manière solitaire, mais s'est au contraire entouré d'une trentaine d'assistants qui ont chacun une spécialité (dessinateurs sur ordinateurs, mélangeurs de couleurs, peintres, modeleurs, sculpteurs, maquetistes, etc...). Murakami publie même la "Hiropon Factory Newsletter", comme un fanzine, pour étendre l'identité de sa marque. En 2001, la Hiropon Factory devient la Kaikai Kiki Corporation.
Avec la montée en puissance de ses équipes de Asaka et de New York, Murakami va également faire évoluer le processus de production. Ses premières oeuvres sont des acryliques peintes à la main, mais au moment de la création de "Cosmos" en 1998 Murakami passe à la technique de la sérigraphie pour gagner en productivité.
Le processus de création a également évolué à l'aide de l'introduction de l'informatique puisque l'ensemble des "motifs murakamiens" comme les fleurs riantes, les yeux, les champignons ont été numérisés et organisés en base de données.
L'équipe de Takashi Murakami s'est tellement agrandie qu'il faut plus parler de véritable studio - à la manière d'un studio de création de dessins animés - que d'une communauté d'artistes. Lors de l'exposition qui s'est tenue en 2001 au MOT (Musée d'Art Contemporain de Tokyo) on comptait pas loin de 50 personnes entre le studio d'Asaka et celui de New York, avec des activités allant de la peinture, le design numérique, le modelage, les sculptures de grande taille, les ballons gonflables aux activités telles que l'emballage et l'expédition, le management, la publicité, la création de site web...

A travers ses oeuvres et le système de production qu'il a instauré, Takashi Murakami propose une redéfinition de l'art contemporain dans son rapport au marché et à la consommation. A première vue ludique, son oeuvre porte également un regard critique sur la société et la créativité du Japon contemporain. Elle reflète et interroge à la fois les nouveaux standards visuels et la situation de la culture japonaise, entre tradition et référence occidentale, technologie et consommation. Elle incarne la nouvelle création artistique au Japon dans son exubérance et sa fantaisie.