05/05/03: Livre L'homme sans talent
10/05/03: Street Fighter 2


Petit historique


influence économique des mangas
les révolutionnaires du mangas


Les mangas des années 80 et 2000
Du manga vers la japanimation

   
     
 
  I. Du manga vers la japanimation, retour sur les origines : le Japon
   
 

:: Les mangas ::
C'est vers 1814 que le célèbre peintre et graveur japonais Katsuhika Hokusaï ( 1760-1849) créa le terme générique manga. Il réalisa à cette époque, pour son projet d'encyclopédie visuelle, une série de caricatures grotesques représentant les principaux protagonistes de l'état de son ère ( l'ère Edo ). Ce travail pris le surnom de " Hokusaï manga ". En traduction littérale, manga signifie à peu de choses près " image dérisoire ". Dès lors, le nom était lancé. Le style suivit peu après. Près d'un siècle plus tard, l'éditeur Kodensha se lança dans la publication du premier magazine sur les manga, le célèbre Shônen Jump. C'est la fondation d'une des plus grandes maisons d'édition japonaise. Elle reste, encore aujourd'hui, entièrement portée sur le manga.


Jusqu'en 1930, le manga n'évolue pas. Il se présente sous la forme de courtes histoires sur quatre cases. Leur toile de fond est presqueexclusivement basée sur la propagande militaire qui précède la deuxième guerre mondiale. Il est inutile de préciser que la guerre et les deux bombes nucléaires de Nagasaki et d'Hiroshima ont porté un sacré coup au Japon. Comme son pays fondateur, le manga se transforme. C'est ainsi qu'on assiste à ce qu'on appelle communément la " Révolution du manga ". Elle est due au grand mangakâ Osamu Tezuka, autrement appelé Tezuka-senseï ( Maître Tesuka ). Celui-ci lance, dès 46, des manga tels que Shin Takarajima ( La nouvelle île aux trésors ), Tetsuwan Atomu, Jungle Tateï ou encore Black Jack.

L'introduction de personnages géants qu'il faut combattre ou encore d'un futur où la criminalité règne en maître après un anéantissement total de la société a une raison d'être. Elle n'est pas sans rappeler la symbolique du monstre d'acier : la bombe nucléaire dévastatrice. Tesuka ira même jusqu'à dessiner un manga pour adultes qui conte l'histoire de deux survivants à l'explosion nucléaire d'Hiroshima. Tezuka apporte également un renouveau dans le style graphique du manga. C'est en effet lui qui introduit un découpage cinématographique dans la bande dessinée japonaise. Il fait sortir le manga de son cadre habituel. Devant l'énorme quantité des productions " Tezukiennes ", on assiste à l'apparition de toute une série de dessinateur copiant le style du maître. C'est l'envol du phénomène manga au Japon. (Illustration : L'Homme sans talent par Yoshiharu Tsuge)


:: Vers la japanimation ::
Tesuka a cependant un rêve depuis qu'il a commencé à publier des manga. Il souhaite faire sortir le manga de son cadre d'origine.Le papier selon lui n'est qu'une étape de ce mode d'expression. C'est la télévision, par l'intermédiaire de l'animation, qu'il vise depuis toujours. En 1961, avec ses propres moyens, il fonde son studio d'animation - le Mushi Production - et transpose ses succès à l'écran. C'est la naissance des séries que l'on retrouvera plus tard en Europe sous le nom de Astro le Petit Robot, Le Roi Léo, Princesse Saphir,... C'est sans doute l'introduction de la sentimentalité dans ses oeuvres qui est à l'origine de son succès. Il avouera plus tard s'être inspiré, au départ, de Walt Disney pour fonder son style, mais sans jamais tomber dans le plagiat. Ironie du sort, c'est en fait Disney qui le copiera pour son plus grand succès. En effet, Le Roi Lion est un remake à peine camouflé de Jungle Tateï.
Quoi qu'il en soit, le manga reste principalement destiné à un public jeune à cette époque. Tesuka signe cependant des oeuvres d'avant-garde telles : Adolf Ni Tsugu, Phoenix 2772 - son plus grand succès - ou encore Cléopatra, le premier dessin animé érotique japonais. Il faudra attendre le début des années 80 pour que le dessinateur le plus prolifique du monde ( Tesuka aurait dessiné quelques 100.000 planches durant sa carrière ) soit dépassé par de jeunes loups. Toriyama, dès 1980, renouvelle le manga en y apportant une touche d'humour jamais abordée. Mais il faudra attendre 1982 pour que la nouvelle vague se mette réellement en route. C'est le tsunami Otomo qui balaye tous les anciens dogmes. Akira, dès sa sortie, crée un phénomène nouveau. Le réalisme est maintenant en place dans le manga.
L'histoire des jeunes motards marque à jamais les Japonais. Ils en font un best-seller dès les premiers volumes. Le style de Katsuhiro Otomo est lancé et rien ne peut l'arrêter. En 1988, l'immense succès de cette fresque de 2000 pages est relancé par l'arrivée dans les salles obscures du film d'animation* d'Akira. Ce dernier est sans doute, et restera à jamais, le plus beau et le mieux réalisé des films d'animation jamais produits. Suivant cette vague, des centaines de dessinateurs lancent des nouvelles séries en abordant les sujets les plus divers. C'est l'éclatement du manga, la diversification.
Même si Tesuka s'était efforcé de toucher à tous les styles et à tous les thèmes durant sa longue carrière, la " griffe " Tezukienne était toujours présente. La venue d'Otomo et du monstre Akira a relancé complètement le style du manga. Il n'a sans doute pas finit d'évoluer et d'étonner ceux qui prédisaient son étouffement, sa fin par épuisement de sujets. Mais Otomo ne s'est pas contenté de lancer un nouveau style au Japon. On peut considérer que c'est lui qui a ouvert ce monde étrange et diversifié ( où il y a autant de bonnes que de mauvaises choses ) aux bras des Européens.

 

  II. Le problème des manga en France
   
  Les mangas atteignent nos contrées dès le début des années 70. Les programmes pour enfants se trouvent devant un dilemme. D'un côté, les productions européennes sont trop peu nombreuses pour une large tranche horaire. D'un autre, les comics américains sont trop répétitifs et violents pour plaire. Ces émissions se rabattent donc sur la production japonaise. Elle est rassurante par sa diversité et sa quantité. Elle a déjà également fait ses preuves devant un public japonais qui lui a réservé bon accueil... Astro le Petit Robot, Le Roi Léo,... de Tezuka sont donc bien vite adapté en français.

Mais ils ne sont pas les seuls à arriver sur le réseau hertzien francophone. Parmi les nouveaux venus, les célèbres Goldorak, Candy, Albator et autre Capitaine Flam se voient réserver une place de choix dans la grille des programmes d'Antenne 2. Mais dès les années 80, d'autres chaînes se mettent à diffuser des manga d'autres styles, plus sérieux. La Cinquième programme notamment Robotech et Max & Cie. Canal+, lui, nous fait découvrir Cobra. Puis arrive l'heure de gloire des animés japonais en France. Les Inconnus avaient raison de parler de ; " Dorothée et ses amis les Japonais ". En effet, le Club Dorothée, la célèbre et désormais défunte émission de TF1, consacrait tout son temps d'ondes ( ou pratiquement ) à la diffusion de dessins animés nippons.
Cette émission nous a fait découvrir des grands noms de l'animation et du manga en général. City Hunter ( Nicky Larson ), Saint-Seya ( Les Chevaliers du Zodiaque ), Dragon Ball Z, Ranma ½, et bien d'autres firent leurs débuts dans l'émission française. Mais elle est également à l'origine de choix étranges et peu judicieux pour une émission destinée aux enfants, par exemple le violent Hokuto No Ken ( Ken le Survivant ). Cette émission, de prime abord très mauvaise par le nombre de critiques, nous a pourtant fait découvrir le monde du manga. Malheureusement, les erreurs de programmation et la censure omniprésente dans tous les dessins animés dégouttèrent les fans. On obligera, pour les mêmes raisons, la fameuse émission à rendre l'antenne en 1997.

Dès lors, les fans perdirent le support visuel qu'offrait la TV. Ils se divisèrent alors en deux groupes. Les uns, découragés que plus aucune chaîne ne passe leurs séries fétiches, se sont détournés du manga. Les autres prirent alors leur mal en patience et se tournèrent vers d'autres supports pour assouvir leur passion. Dès 1991, Glénat s'était lancé dans la publication de manga ( version papier ) en Français. Akira fut le premier à bénéficier d'une traduction dans la langue de Molière. Mais c'est en 1994, avec l'arrivée sur le marché français de Dragon Ball ( toujours chez Glénat ) que ce média prend de l'ampleur.

Les maisons d'édition se multiplient donc et le manga papier prospère. Dès 94, c'est le marché du vidéo qui prend son envol. AK-Vidéo commence à distribuer les OAV de Dragon Ball. C'est donc au tour de l'animation de faire le bonheur des amateurs. Mais la mort du Club Dorothée annonce une année bien noire pour le milieu des traductions. En 1997, de nombreux éditeurs mettent la clé sous la porte ( Katsumi, Dragon Vidéo, PFC Vidéo,... ) et d'autres arrêtent purement et simplement leurs publications de manga pour se consacrer à autre chose. Il en va de même pour les éditeurs de manga papier. Samouraï et Sémic, par exemple, stoppent toute publication. Cependant cette période noire est bien moins ressentie dans le milieu du manga papier, et, les perspectives restent bonnes pour ce secteur.
Glénat, J'ai Lu, Tonkam, et d'autres furent les premiers à traduire. Ils continuent désormais sur leur lancée et multiplient les sorties en diversifiant les produits. Il n'en va pas de même pour les vidéos. Elles se relèvent difficilement de ce grand nombre de faillites. D'autant plus que les manga sont en vente libre, alors qu'elles sont parfois destinées à un autre public que les enfants. Ce n'est pas un mal en soit, mais ce n'est pas non plus sans conséquences négatives. Pour prendre un exemple, l'esprit coquin de personnages principaux est ressenti comme tout à fait naturel chez les Japonais. Or, les parents européens ( très conservateurs ) ont très mal pris que leurs gamins de huit ans lisent ces " cochonneries " où la présence des formes féminine est si gracieusement représentée.
Les comités de censure ne furent pas longs à agir. Toute une partie de la production nippone s'est vue empêchée de séjour en France et en Belgique. Pourtant des BD européennes comme Stan Caïman ou les très célèbres Manara ne posèrent jamais aucun problème de conscience aux lecteurs de Pilote et de Métal Hurlant, malgré leur statut érotique... Ils étaient pourtant également en vente libre. C'est là que réside tout le mystère de la pudeur européenne. Certains débordements, parce qu'ils sont vieux et connus de tous sont permis. Alors que d'autres, plus jeunes ( et bien souvent moins graves ) ne le sont pas. Allez comprendre...

Mais 1998 fut malgré tout une bonne année pour le manga. 99 semble en être d'ailleurs la juste continuation. Ce phénomène est en pleine expansion. Son horizon s'est encore agrandi et enrichi avec l'arrivée de titres tels que Raïka, Michael, Kenshin et Mermaid Scar chez Glénat ou de Bouddha, Tsukasa Hojo Recueil et Cats Eye chez Tonkam. Et la parution des piliers actuels du manga en Europe - Dragon Ball, Ranma ½, Saïlor Moon, Détective Conan,... - s'est bien poursuivie à un rythme régulier. Il est cependant important de noter que la France ( et donc la Belgique ) est un des derniers pays à avoir été touché par le virus manga en Europe. En effet, l'Angleterre ( suivant comme toujours les Américains ) fut la première sur le marché avec des éditeurs comme Dark Horse et Manga Vidéo. Puis, plus étonnant, les suivant furent les ibériques. L'Espagne et le Portugal sont en effet de grands consommateurs de manga. Les Italiens également. La France a donc suivi le mouvement et s'est après tout fort bien débrouillée. Elle a ainsi permisà la Belgique francophone, à la Suisse et au Québec de rentrer dans le " Phénomène Manga ".